Pendant trois semaines l’exposition 1871 – La Commune de Paris : Une histoire moderne a été présentée au Réfectoire de l’ancien couvent des Cordeliers, à quelques pas de l’amphithéâtre de l’école de médecine où se réunissaient les membres du club communard éponyme, dont les membres les plus actifs étaient Nathalie Le Mel et Eugène Varlin, et tout proche de l’emplacement choisi par la Commune pour ouvrir une école professionnelle d’art industriel pour jeunes filles.

Réfectoir des Cordelier, Paris 6e - La façade
Réfectoir des Cordelier, Paris 6e - La façade

Dans ce lieu un peu magique, où l’on sent aussi les fantômes des révolutionnaires de 93, entouré de hauts murs du Paris médiéval, des milliers et des milliers de visiteurs se sont pressés du 28 mai au 19 juin pour (re)découvrir la Commune. La scénographie choisie par La Fabrique créative d’appuyer les panneaux sur des gabions rappelant les barricades, la présence encadrée de rouge de quatre immenses et belles photos séparant les espaces, les innombrables documents originaux, comme le mur admirablement réalisé d’affiches communardes (venant du fonds de la Bibliothèque historique de la ville de Paris) ou les superbes tableaux donnés par le musée Carnavalet et différents prêteurs privés ou syndicaux, ont donné au public le sentiment de plonger dans le Paris révolutionnaire de 1871 et dans la diversité de ses arrondissements, et de vivre, pendant quelques heures, quelque chose du rêve communard d’un monde de justice.

Mais l’exposition ne visait pas seulement à cette appréhension sensible du passé. Si le premier et le dernier espace donnaient, sans concession, sur les erreurs de la Commune, les bases de l’histoire politique de la Commune et de la Semaine sanglante, l’essentiel de l’exposition reposait sur trois grands axes qui donnaient à lire et à voir à quel point les idées et l’œuvre de la Commune résonnent encore de nos jours. Ô combien !

1871 – La Commune de Paris : Une histoire moderne - Exposition Musée des Cordeliers (source : https://la-fabrique-creative.fr/projets/1871-la-commune-de-paris/)
1871 – La Commune de Paris : Une histoire moderne - Exposition Musée des Cordeliers (source : https://la-fabrique-creative.fr/projets/1871-la-commune-de-paris/)

À lire le livre d’or, ce qui a frappé très souvent les visiteurs c’est l’incroyable richesse de l’œuvre de la Commune en à peine plus de deux mois de vie. Sans doute la clé était à en rechercher dans la première partie de l’exposition qui traitait de la démocratie communarde. Cette république au drapeau rouge a pu surmonter et s’appuyer sur la diversité des communards pour inventer une démocratie inédite, populaire, directe, permanente, ne s’opposant pas à la démocratie représentative mais créant des conditions pour que ceux qui n’avaient guère de droits comme les femmes et les étrangers prennent une place considérable dans la cité.

Puis venait une partie où se manifestaient les actions concrètes de la Commune, reflétant une culture humaniste autour des notions de progrès, de liberté et de justice. De la séparation de l’église et de l’état à la justice accessible à tous, de l’école gratuite aux pensions aux enfants naturels, des premières mesures pour les sourds-muets à la liberté des arts, c’est le cœur battant des aspirations les plus nobles du peuple qui se manifestait à la Commune.

Enfin, la Commune a avancé au grand galop sur le chemin de la démocratie sociale. Très concrètement d’abord, elle a su répondre aux urgences d’une population affectée par le Siège et les mesures antisociales de Thiers : se nourrir, se loger, se soigner ! Mais depuis la fin du Second Empire s’était aussi développé avec vivacité le sentiment que la première injustice tenait à l’exploitation et à l’aliénation capitaliste. Le produit du travail doit revenir au travailleur ; de là une invention du droit du travail, du droit au travail et de l’autogestion.

L’exposition était organisée par le Comité d’histoire de la Ville de Paris dont tout le personnel doit être vraiment remercié pour son très grand dévouement. La Ville de Paris n’a pas lésiné sur les moyens donnés à l’exposition et elle doit en être félicitée. Mais on est en droit de s’étonner qu’elle n’ait pas donné plus de publicité à l’exposition et que celle-ci n’ait pas duré plus longtemps.

L’exposition des Cordeliers devrait, fort heureusement, connaître des suites. On l’annonce pour la fin de 2011 aux mairies des IIe et XVIIIe arrondissements. Des institutions comme l’Université Paris 6 pourraient également la présenter. Ce sera l’occasion pour toutes celles et tous ceux qui n’ont pu visiter l’exposition de retrouver la flamme de ces 72 jours qui brûle encore.

JEAN-LOUIS ROBERT

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