Quelques précisions sur le monument de Paul Moreau-Vauthier qui a été, maintes fois, l’objet de malentendus et d’erreurs d’interprétations.
Jean BRAIRE, anciennement Secrétaire général des « Amis de la Commune » s’est longuement expliqué sur le monument de Paul Moreau-Vauthier et sur ses inscriptions. La mention « Aux victimes de la Révolution » essaie de réconcilier tous les morts de la Commune, c’est à dire 30 000 Parisiens et une centaine de Versaillais tués dans les combats. [1]
Il relève une erreur dans le livre de Guy de la BATUT [2] :
« les martyres de la Commune ( les 147 fusillés du 28 mai 1871) ont été enterrés dans la tranchée située le long du mur de la 76ème division, et que l’on appelle depuis le Mur des Fédérés et qui est maintenant orné d’une sépulture de Moreau-Vauthier, rappelant le sanglant épisode. Chaque année, au mois de mai, devant le mur, a lieu une commémoration révolutionnaire. »
L’écrivain chinois Shen DALI, lors de son arrivée à Paris a désiré en savoir plus sur le monument de Paul Moreau-Vauthier :
[…] « J’avais désormais des doutes sur ce monument tant admiré en Chine. Curieux, je me renseignais auprès de M. Jean BRAIRE, secrétaire général de l’association des Amis de la Commune de Paris. « Les survivants de la Commune ont toujours refusé ce mur » me dit-il.
Sur ses recommandations, je me lançai dans une enquête sur l’origine du mur de Paul Moreau-Vauthier. Le 23 avril 1982, je découvris dans « Les grands chefs d’œuvres des sculptures du XXe siècle », au musée des arts décoratifs à Paris, la photo de Paul Moreau-Vauthier prise devant son « mur » au moment de l’érection du monument. Au bas de la photo, il est écrit « Aux victimes des révolutions ».
Après consultation des procès-verbaux du Conseil de Paris (1907 – 1909), l’écrivain chinois trouva toutes les résolutions sur l’érection du mur de Paul Moreau-Vauthier. Ce document s’intitulait effectivement « Aux victimes des révolutions ». D’autres documents montrent qu’on a confondu Paul-Moreau-Vauthier (1871-1936) sculpteur de monuments et son père Edme, Augustin, Jean Moreau-Vauthier (1831-1893) sculpteur sur ivoire, membre de la commission fédérale des Artistes, sous la Commune.
Shen DALI affirme que pendant ces années, en Chine, en U.R.S.S. et dans les démocraties populaires, le monument de Paul Moreau-Vauthier continua d’être tenu comme le symbole de la révolution du 18 mars 1871 [3].
Danielle Tartakowski [4] s’est aussi intéressée au mur de Paul Moreau-Vauthier qui reste caché et ignoré dans un petit square de l’avenue Gambetta, en lisière du Père Lachaise.
Elle nous apprend que le conseil municipal de Paris, en 1907, acquiert l’œuvre de Moreau-Vauthier, intitulée « Aux victimes des révolutions » et qui comporte aussi cette citation de Victor Hugo « Ce que nous demandons à l’avenir, ce que nous volons de lui, c’est la justice, pas la vengeance ».
« Œuvre ambiguë » qui tente de réconcilier tous les morts de la Commune, victimes de l’un et de l’autre camp ».
« Installée hors les murs du cimetière, cette œuvre doit sans doute à ses ambiguïtés de ne bénéficier d’aucune inauguration officielle et d’être aussi bien boudée par les organisations ouvrières ».
Parfois, pourtant, un avis discordant : dans le n° de l’Humanité du 29 mai 1921, pour le cinquantenaire de la Commune, Séverine, dans son article « Ce que dit le Mur » écrit :
« Contemplez-le ce Mur où il a été interdit de mettre le splendide monument de Moreau-Vauthier, consigné au dehors, tout caché, dans l’avenue Gambetta […] ».
Le 24 mai 1936, l’insigne officiel sur le parcours traditionnel est la reproduction du monument de Moreau-Vauthier, les années suivantes et jusqu’en 1939, reprise de l’œuvre de Pichio. En 1942, une banderole rouge est disposée sur la poitrine de la femme du monument Moreau-Vauthier.
Après 1945, les amis de l’Humanité éditent une carte postale en couleurs, pour la manifestation du Père Lachaise, qui reproduit le mur de l’avenue Gambetta.
C’est, sans doute, la dernière fois qu’il est fait référence à ce monument tant controversé.
Marcel CERF
Jamais l’association des Amis de la Commune de Paris n’a appelé à défiler devant ce monument.
La vérité, dit encore Jean BRAIRE, est que sur le Mur des Fédérés, il n’y a qu’une plaque portant cette inscription : « Aux morts de la Commune 21 – 28 mai 1871 ».
Notes
[1] Sur les traces des Communards, p. 182, Paris, 1988
[2] Les Pavés de Paris, tome II, pp. 274. Editions Sociales, Paris, 1937
[3] Shen Dali : « A la recherche du temps des cerises - la Commune de Paris vue par un écrivain chinois », cahiers d’histoire de l’institut de recherches marxistes, p. 35, N°44 (1991)
[4] Nous irons chanter sur vos tombes, p. 71, Aubier, 1999