Le 3 mars 1879, l’Assemblée nationale vote la loi d’amnistie partielle pour les actes commis pendant la Commune de Paris. Le 11 juillet 1880, C’est enfin l’amnistie totale, mais déjà, le 23 mai 1880, avait eu lieu le premier défilé, non clandestin, devant le Mur des Fédérés.
De retour de déportation ou d’exil, les communards se retrouvent dans la misère.
C’est alors que, en mai 1882, fut fondée « entre tous les anciens combattants de 1871, leurs compagnes et les membres de leurs familles », une société de secours mutuels qui prit le nom de La Fraternelle.
Le premier secrétaire de cette société était Ernest Navarre, instituteur puis comptable et qui fut, pendant la Commune, membre du comité central de la garde nationale. Le siège de la société était domicilié chez lui, au 133, rue Saint-Antoine.
Le trésorier de l’association était Jean Allemane, ouvrier typographe, combattant de la Commune, déporté en Nouvelle-Calédonie.
La Fraternelle avait pour but de venir en aide à ses sociétaires malades où qui, par suite d’infirmités ou de vieillesse, étaient dans la détresse et elle s’efforçait de soutenir les veuves des anciens combattants de la Commune décédés sans laisser de ressources.
Après la loi de 1901 sur les associations, la société mutuelle La Fraternelle, se transforma le 1er septembre en Association fraternelle des anciens combattants de la Commune.
Le secrétaire en était Jules Martelet, ancien membre de la Commune, élu par le 14e arrondissement qui, après la Semaine sanglante, s’était réfugié à Bruxelles puis émigra aux États-Unis. Dès son retour en France, en 1880, il fut un militant socialiste actif.
Le président était Edmond Goupil, élu membre de la Commune dans le 6e arrondissement. Docteur, il habitait 9, rue de l’Odéon, siège de l’association.
En 1908, l’association obtint que la Ville de Paris fit apposer la plaque (elle se trouve toujours sur le Mur des Fédérés) et fit édifier par souscription un monument en l’honneur de la Commune au cimetière Montparnasse.
Le 25 janvier 1914, au cours de son assemblée générale, le président de l’association soumit le projet suivant :
Pourront être admis tous ceux dont l’attachement à la cause aura été suffisant.
Ce qui ouvrait l’admission notamment aux fils des anciens combattants comme Longuet et Ranvier, et aussi à tous ceux que l’association voudrait bien admettre.
Après discussion, à laquelle prirent part la citoyenne Séverine, les citoyens Goupil, Élie May, Camélinat, Vaillant, Martelet, tous anciens de la Commune, il est décidé :
que pour permettre aux enfants des anciens combattants de la Commune et à tous les citoyens qui veulent suivre les excellents exemples de leurs aînés de 1871, l’association compléterait son titre comme suit :
Association fraternelle des anciens combattants et des amis de la Commune.
Le 28 juillet 1918, le docteur Goupil démissionne pour raison de santé et est remplacé à la présidence par Élie May, membre de l’Internationale et qui avait été nommé directeur de la Manufacture des tabacs, puis intendant divisionnaire par la Commune.
Les scissions politiques et syndicales portèrent un coup à l’association et diminuèrent notamment ses moyens. On pouvait lire dans « Le Peuple » du 25 mars 1927 :
L’Association fraternelle des anciens combattants et des amis de la Commune va une fois de plus commémorer l’anniversaire de la Commune. Mais trop pauvre pour organiser le traditionnel banquet, nous nous contenterons d’un modeste déjeuner amical.
Malade en 1927, le président Élie May mourut en 1930. En 1929, un des amis de l’association résolut de relancer celle-ci. Il fit appel à Camélinat et, en 1930, l’association devenait l’Association des vétérans et amis de la Commune.
Camélinat, ancien directeur de l’hôtel de la Monnaie pendant la Commune, fut élu président et Édouard Chenel secrétaire général.
On y retrouvait les survivants de la Commune comme Chevalier, Poensens, Sureau, Clerget, Lagriffoul, Philippe et Adrien Lejeune (qui fut le dernier communard survivant, et qui mourut en 1942 dans une maison de repos en Union soviétique).
L’association reprit son activité en 1944, jusqu’en 1957. Édouard Chenel mourut en 1959.
Le 14 mai 1962, sur l’initiative d’Emmanuel Fleury, une assemblée se tint à la Maison des métallos sous la présidence de Jacques Duclos, où fut reconstituée l’Association des amis de la Commune de Paris (1871) qui se fixait pour but d’honorer la mémoire des héros de la Commune, de faire connaître leur vie et défendre leur idéal.
L’assemblée esquissa un programme d’activités, conférences et manifestations diverses, pour faire connaître cette période glorieuse de notre histoire. Le conseil d’administration fut composé comme suit :
Arthur Adamov, Florimond Bonte, Jean Braire, Maurice Choury, Jean Dautry, Jacques Duclos, Emmanuel Fleury, Robert Francotte, Eugène Hénaff, Lucien Jayat, Gabriel Pioro, Maurice Pépin et Émile Tersen.
Jacques Duclos fut élu président et Emmanuel Fleury, secrétaire général.
Le décès, en mars 1970 d’Emmanuel Fleury et celui d’Arthur Adamov survenant quelques mois après la mort de Maurice Choury, historien de la Commune, affecteront tous les amis de la Commune.
En 1970, sous la présidence de Jacques Duclos, Jean Braire fut élu secrétaire général, Georges Bossi et Jacques Zwirn, secrétaires.
L’association s’employa à préparer l’année du centenaire.
En 1971, le gouvernement français passa sous silence le centenaire de la Commune de Paris, restant ainsi dans la ligne de la bourgeoisie qui, pendant cent ans, avait dénigré cette glorieuse épopée de la classe ouvrière française.
Mais si, pour le gouvernement de l’époque, la Commune de Paris était tombée dans l’oubli, ce ne fut pas le cas pour le peuple français qui, à l’appel des Amis de la Commune et de nombreuses organisations, commémora, sous différentes formes (expositions, spectacles, conférences, manifestations, etc.) cet événement historique.
Grâce à cette action, des millions de Français ont pu prendre connaissance de cette page glorieuse de notre histoire, qui se trouve réduite à quelques lignes ou même complètement ignorée dans les manuels d’histoire de notre pays.
En 1975, à la mort de Jacques Duclos, c’est un historien du mouvement ouvrier, Jean Bruhat, qui fut élu président.
En septembre 1977, avec l’aide financière et au nom des fédérations CGT, une délégation des Amis de la Commune, composée de Jean Bruhat, de Jean Braire et de Daniel Tamanini, s’est rendue en Nouvelle-Calédonie à l’occasion du centenaire de la déportation des communards. Elle y apporta le salut des travailleurs français dans de nombreuses réunions sur le territoire et fleurit, au nom des Amis de la Commune et de la CGT, les tombes des révolutionnaires français qui reposent là-bas.
Aujourd’hui, le président de l’association est Claude Willard, universitaire.
Les anciens combattants de la Commune ne sont plus, mais plus nombreux seront « leurs amis » et mieux l’association pourra honorer la mémoire des héros de la Commune de Paris, mieux elle pourra contribuer à la connaissance de leur vie, de leur activité, de leur idéal.
Pour adhérer ou soutenir son action, chacun peut s’adresser à l’Association des amis de la Commune qui, pour la première fois depuis cent cinq ans, a ses propres locaux au lieu historique qu’est la Butte-aux-Cailles, au 46, rue des Cinq-Diamants, Paris 13e.
Jean Braire
Article écrit par Jean Braire dans son ouvrage Sur les traces des communards – Enquête dans les rues du Paris d’aujourd’hui, Éditions Amis de la Commune, 1988.