Un couple breton dans la Commune
Nous connaissons mieux Angèle grâce au travail de Patrick Decreus et celui de Nadine Le Dily du cercle celtique de Noumea qui se sont attachés à la sortir de l’ombre.
Marie-Ange dite Angèle naît à Guingamp, ville des Côtes-du-Nord (aujourd’hui Côtes d’Armor), le 13 septembre 1842. Elle se marie à Rennes à Martin Masson, un ajusteur né le 10 novembre 1842 à Guichen, ville d’Ille-et-Vilaine située un peu au sud de Rennes.
On retrouve sa trace à Paris en octobre 1870 où elle est arrêtée à la suite de la journée révolutionnaire du 31 octobre pour avoir « promené un drapeau rouge dans les rues ». Le rapport de police nous apprend qu’elle vit 123, rue de Charonne, qu’elle est ouvrière, plus précisément
piqueuse de bottines, qu’elle n’a pas d’enfant et — horreur pour les bourgeois — qu’« elle fréquente les clubs politiques avec son mari ».
Âgée de 29 ans elle participe à la Commune. On ignore la part prise par Angèle et son mari, à la lutte du 21 au 28 mai 1871. Mais elle est arrêtée. Elle est jugée le 31 mai 1871 par le 4e conseil de guerre. Comme on ne peut rien prouver contre elle, un non-lieu est prononcé le 15 décembre 1871 et elle est libérée.
Son mari avait été condamné le 6 octobre 1859, par le tribunal correctionnel de Redon (Ille-et-Vilaine), à six jours de prison pour tapage dans une église. On avait sur sa conduite les renseignements les plus mauvais. Pendant l’insurrection, il fut employé à l’atelier de l’École militaire où l’on fabriquait les mitrailleuses, fusées, bombes, etc...
Il fut condamné, le 27 octobre 1871, par le 5e conseil de guerre, à la déportation simple et à la privation des droits civiques. Déporté, il fut autorisé à habiter à Nouméa puis fut réintégré, le 29 janvier 1875, à l’île des Pins pour inconduite. Il est dit de caractère insoumis et exalté, de moralité passable. Il faut dire qu’il s’était mis à boire.
Le 26 ou 27 juillet 1873, Angèle embarque sur le Fénelon, au départ du Havre, pour rejoindre son mari avec 69 autres femmes, épouses de déportés.
Le 15 janvier 1879, Martin Masson obtient une remise de peine. Le couple ainsi que leurs deux filles jumelles, Félicité et Charlotte nées à Nouméa le 12 octobre 1878, embarque sur le Picardie de la compagnie Valéry le 19 juin 1879, en compagnie notamment de Nathalie Lemel.
Ils débarquent à Port-Vendres, commune des Pyrénées Orientales, le 7 septembre 1879, avec 490 personnes, dont 88 femmes et 125 enfants.
L’exaltation du retour passée, il semble que Martin et Angèle soient retombés dans la routine de leur ancienne vie parisienne. Angèle décèdera le 16 novembre 1895 à l’âge de 53 ans à l’hôpital Ménilmontant, actuel hôpital Tenon. Elle sera inhumée au cimetière de Pantin.
Son mari décèdera également à l’hôpital Ménilmontant, en 1903.
PATRICK DECREUS Comité Trégor-Argoat -
NADINE LE DILY Cercle celtique de Nouméa