VALLÈS LE RÉFRACTAIRE

Vallès le réfractaire, La Raison, mensuel de la Libre Pensée, n° 509, pages 28-29.

Jules Vallès est un journaliste engagé dans les luttes politiques et sociales d’un siècle où le capitalisme, en pleine expansion, instaure une inégalité fondamentale de la répartition des richesses.

Il est sensible à la montée du prolétariat et au développement de sa conscience de classe. Juin 48 et le coup d’état du 2 décembre 1851 sont deux évènements qui vont le marquer à jamais et feront de lui, comme l’a si bien versifié Eugène Pottier : Le Candidat de la misère Le député des fusillés (Février 1885)

En 1887, il fonde La Rue où vont collaborer les principaux opposants au Second Empire. Après la proclamation de la République, il devient un des personnages les plus populaires de Belleville, adversaire redoutable du gouvernement dit de « la défense nationale ».

Le 22 février 1871, il publie le premier numéro du Cri du Peuple. Dans ce journal, écrit Pascal Samouth, il donnera une belle leçon d’internationalisme ouvrier

«... J’entends le cœur des pauvres de Berlin battre à l’unisson du nôtre à travers les frontières nouvelles définies à coup de sabre ... Ne tire pas, socialiste ! ».

Membre de la Commune, il appartient à la minorité mais n’est inféodé à aucune formation (Blanquistes, Internationaux ou vieux Jacobins). Après l’amnistie, il n’adhère à aucun parti. Pascal Samouth le définit ainsi :

« Jules Vallès a choisi le camp de la classe ouvrière, celui du socialisme révolutionnaire ».

Vallès est avant tout un grand écrivain et un véritable poète. Ses descriptions de la proclamation de la Commune à l’Hôtel de Ville sont de superbes morceaux d’anthologie.

« Son œuvre est comme un étendard criblé de chevrotines, mais on y voit un coin de ciel, un rayon de soleil, un désir d’enfant, la soif d’une tendresse » (Gaston Monmousseau).

Vallès ressuscite Le Cri du Peuple, le 28 octobre 1883. Il ouvre les colonnes de son journal à toutes les tendances de la mouvance socialiste ; les Guedistes y prendront bientôt une place prépondérante.

Oui, l’Insurgé a enthousiasmé ses lecteurs par la fougue révolutionnaire de ses brillants éditoriaux, mais ne succombons pas au charme des écrits hagiographiques trop laudatifs de ses admirateurs.

Vallès a sa part d’ombre comme chacun de nous. Lucien Scheler, grand spécialiste de Jules Vallès, a apprécié cet écrivain de talent « cette inépuisable générosité de l’invention, cette richesse d’artiste, de bon ouvrier des Lettres » [...] « Mais sa magnificence verbale n’exempte pas Vallès de reproches mérités : on admettra difficilement ses jugements hâtifs, son hostilité mal raisonnée et suprémiste à l’égard du groupe majoritaire à la Commune, ses injustes attaques contre Lissagaray, son antisémitisme. » (1)

Des reproches de même nature sont relevés chez Marie-Claire Bancquart, autre excellente spécialiste de Vallès. Elle le félicite pour « son souci généreux d’unir tous les hommes sans préjugés » mais, elle ajoute :

« À cette générosité disons franchement qu’il existe des limites inquiétantes : Vallès est comme Proudhon antisémite, et même xénophobe à ses heures ». (2)

Il faut aussi signaler la conception particulière de l’amitié pratiquée par le Réfractaire. Pendant de longues années, Arthur Arnould, ancien membre de la Commune, a rendu de nombreux services à Jules Vallès mais quand, une fois, il a sollicité, à son tour, son vieil ami, celui-ci n’a pas répondu à sa demande.

Ce qui fait dire à André Wurmser, critique littéraire à l’Humanité :

« Arthur Arnould ne manque pas de raisons de se plaindre de Vallès, qui lui témoigne une affection profonde et le traite à l’occasion, avec une désinvolture blessante et exige plus qu’il ne donne ».

Ces quelques remarques n’ont pas pour objet de ternir l’image de Jules Vallès, mais simplement de faire de l’Insurgé un personnage humain avec ses qualités et ses défauts.

N.B. : Jules Vallès a écrit en 1880 un ouvrage peu connu intitulé Souvenirs d’un étudiant pauvre, il évoque sa rude adolescence et quelques épisodes d’un humour truculent sur les débuts de sa vie sentimentale. C’était le livre préféré de Gabriel Chevallier l’auteur de Clochemerle.

Marcel Cerf

Vallès le réfractaire, La Raison, mensuel de la Libre Pensée, n° 509, pages 28-29

Notes

(1) Préface du Proscrit, page 26, tome IV des œuvres de Jules Vallès sous la direction de Lucien Scheler, Les Editeurs Français réunis, 1950.

(2) Marie-Claire Bancquart, Un homme sur les barricades, Le Monde, 3 mai 1969.

 

 

LA COMMUNE, L’ACTION DES FEMMES

La Commune, l’action des femmes, Editée et vendue par l’Association des Amis de la Commune de Paris.

La Commune de Paris rend possible la continuité de l’action des femmes pour la reconnaissance de l’égalité entre les sexes, l’abolition du capital et de toute forme d’exploitation. Ces révolutionnaires comprennent que elles seules peuvent changer leur condition pour s’imposer sur le terrain politique. Elles ont conscience que si les femmes n’existent pas sur la scène publique, elles resteront condamnées à l’obscurité, à la dépendance, à l’infériorité. Dès le début de la Commune, les femmes s’organisent en un mouvement aux idées progressistes pour repenser leur place dans la société. Ce combat est, malheureusement, toujours d’actualité ! Les femmes dans le monde continuent de subir des violences parce qu’elles sont des femmes : assassinats, mutilations, viols, prostitution... Et ce, bien qu’aucun précepte d’aucune nature ne puisse légitimer de tels actes envers des êtres humains. Dans nos sociétés occidentales, malgré des avancées législatives au cours du XXe siècle, les conditions hommes-femmes ne sont pas égalitaires dans les pratiques, il existe toujours deux poids, deux mesures. Les femmes et les organisations féminines ont de bonnes raisons de rester mobilisées pour exiger l’application effective de ce qui a été obtenu concernant : l’accessibilité aux carrières professionnelles, les conditions de la vie quotidienne telles qu’elles sont organisées et financées, la parité au sein des partis politiques et de continuer la lutte contre les violences et les discriminations faites aux femmes. Les Communardes ont payé un lourd tribut dans l’espoir de voir triompher leur idéal de démocratie. Au travers de leur exemple, il est essentiel de comprendre que chaque fois que le droit des femmes progresse, nous avançons vers un monde plus civilisé.

Patrick Cavan

La Commune, l’action des femmes, Editée et vendue par l’Association des Amis de la Commune de Paris.

Dernières publications sur le site