Belfort a célèbré en 2010 le 130e anniversaire de son célèbre monument et commémorera en 2011, les 140 ans de la levée du siège de la ville.
La municipalité a décidé de réparer une lacune : le Lion, sculpté par Auguste Bartholdi, en 1880, mais qui n’a jamais été inauguré, le sera bientôt, après sa restauration. Fin août 2010, le félin s’est offert un gommage afin d’éliminer les mousses, lichens et autres parasites qui ternissaient son pelage de grès rouge.
Ce monument, qui domine la ville depuis 130 ans, symbolise la résistance de Belfort pendant la guerre de 1870. La population et la garnison, dirigée par le colonel Denfert-Rochereau, s’illustrèrent pendant 103 jours (du 3 novembre 1870 au 18 février 1871) par une défense héroïque face à l’envahisseur prussien.
Cet épisode glorieux valut à la ville d’échapper à l’annexion de l’Alsace et de la Lorraine pour former, avec une centaine de communes, le Territoire de Belfort, le plus petit département français de l’époque. Le sculpteur Auguste Bartholdi (1834-1904) fut sélectionné pour réaliser un monument dédié au courage des Belfortains. Un choix qui doit autant à son talent artistique qu’à sa conduite patriotique pendant la guerre franco-prussienne. En effet, l’adjudant major Bartholdi s’illustra le 13 septembre 1870 dans la défense du pont d’Horbourg, près de Colmar, sa ville natale[1].
En octobre, le futur sculpteur est nommé aide de camp de Giuseppe Garibaldi, commandant de l’armée des Vosges, composée de francs-tireurs. Il l’accompagnera jusqu’à son retour en Italie via Marseille, le 15 février 1871. Proche des républicains modérés comme Léon Gambetta et Adolphe Crémieux, tous deux ministres du gouvernement de la Défense nationale, Bartholdi condamne la Commune, qu’il accuse de diviser la France.
Le lion aux buttes-Chaumont ?
Quelques jours après que les derniers communards aient été fusillés au mur des Fédérés, il s’embarque pour l’Amérique. C’est au cours de ce voyage que lui vient l’idée d’ériger une statue dédiée à la liberté, à l’entrée du port de New-York. La Liberté éclairant le monde sera inaugurée en 1886. Mais revenons à notre Lion. En 1873, une souscription nationale est lancée pour financer le monument de Belfort. Elle rapporte 92 000 francs. Inspiré par le Sphinx de Gizeh, découvert au cours d’un voyage en Egypte en 1856, Bartholdi choisit de représenter un lion, « harcelé, acculé et terrible encore dans sa fureur ». Sa sculpture sera adossée à la roche, sous la citadelle surplombant la ville. Après six ans de travaux, le 14 janvier 1880, les échafaudages sont démontés et dévoilent la taille imposante de l’animal : 22 mètres de long sur 11 mètres de haut. Un différend entre le sculpteur et la municipalité empêchera son inauguration officielle. Bartholdi se contentera d’organiser une retraite aux flambeaux, le 28 août 1880. Un an plus tôt, il expose au Salon une étude en terre cuite de son Lion,conservée aujourd’hui au musée Bartholdi à Colmar [2] . « Le conseil municipal de Paris a décidé l’acquisition du Lion de Belfort ; il sera probablement érigé aux Buttes-Chaumont », s’enthousiasme Bartholdi, qui y voit « un hommage au patriotisme alsacien » et à celui « de la population de Paris pendant le Siège ».
Finalement, la statue sera installée en 1880 place Denfert-Rochereau, baptisée ainsi en hommage au défenseur de Belfort.
John Sutton
Notes
[1] Pierre Vidal et Christian Kempf, Frédéric-Auguste Bartholdi, Les créations du Pélican/Vilo (2000)
[2] Musée Bartholdi : 30 rue des Marchands, Colmar ; Tél : 03 89 41 90 60 — Site : musee-bartholdi.com