Dans la salle évoquant la Commune, une affiche officielle, datée du 17 octobre 1870, annonce une souscription pour « l’achat de canons se chargeant par la culasse ». Elle est signée du maire du XVIIIe arrondissement, Georges Clemenceau.
Le 18 mars, il tentera en vain de s’opposer à l’exécution des généraux Lecomte et Thomas. Clemenceau entretiendra toute sa vie une amitié avec Louise Michel et plaidera pour l’amnistie générale des communards, aux côtés de Victor Hugo et de Louis Blanc. La vitrine principale de la salle du musée contient un agrandissement photographique des canons entreposés au champ des Polonais. Le dessinateur Pilotell évoque cet événement fondateur sous la forme d’un dialogue entre deux personnages. Thiers :
Emparez-vous de ces canons !
L’officier de la Garde nationale :
Est-ce que les Prussiens n’ont pas leur compte ?
Pilotell dessinait dans La Rue, le journal de Jules Vallès. Pendant la Commune, il fut nommé directeur de l’École des Beaux-Arts et délégué du Musée du Luxembourg. C’est à Montmartre que tout a commencé et c’est ici que tout a fini, avec la construction de la hideuse basilique du Sacré-Coeur, bâtie pour expier les « péchés » des communards. Trois photographies montrent les différentes étapes de sa construction, achevée en 1919. Mais, les Montmartrois n’ont pas mérité de se voir imposer cette « meringue » géante. « Ils furent les plus ardents défenseurs de la Commune, prônant la volonté d’un monde sans guerre, égalitaire, fraternel, libre et cultivé », proclame un panneau du musée.
Du Chat Noir au Lapin Agile
Des gravures représentent les barricades des places Blanche, Pigalle et Clichy sur lesquelles les femmes de Montmartre se sont battues vaillamment pendant la Semaine sanglante. Le buste en plâtre de la plus célèbre d’entre elles, Louise Michel, figure en bonne place dans une vitrine du musée. Après sa déportation en Nouvelle-Calédonie, elle fera un retour triomphal à Paris, le 9 novembre 1880. L’esprit de révolte n’était pas mort comme le montra un an plus tard la création du cabaret du Chat noir, à Montmartre, resté un quartier frondeur.
Dès son ouverture, en 1881, par Rodolphe Salis, Le Chat noir fut le rendez-vous des avant-gardes artistiques, littéraires et musicales de Paris, autour du chansonnier Aristide Bruant, de l’humoriste Alphonse Allais, du dessinateur
Alexandre Steinlen, auteur de plusieurs gravures sur la Commune, et des compositeurs et pianistes Erik Satie et Claude Debussy. Le Chat noir donna même son nom à une revue littéraire à laquelle collabora Verlaine. En juin 1885, le cabaret déménagea en fanfare du boulevard Rochechouart à la rue Victor-Massé.
Ce second Chat noir est célèbre pour son théâtre d’ombres chinoises. Le poète et chansonnier anarchiste Gaston Couté s’y produisait dans les années 1900. De ces cabarets montmartrois, seul subsiste aujourd’hui Le Lapin agile, dont l’enseigne originale est d’ailleurs conservée au musée Montmartre. Son auteur, le dessinateur André Gill, membre de la Fédération des artistes pendant la Commune, a donné son nom au fameux cabaret. Grâce à un jeu de mots, le lapin à Gill est devenu Le Lapin agile.
John Sutton
Musée de Montmartre, 12 rue Cortot, Paris XVIIIe. Ouvert tous les jours de 10 h à 18 h.
Tél : 01 49 25 89 39 • museedemontmartre.fr