TOUT A CHANGÉ MAIS RIEN N’A CHANGÉ
Louise Michel voyait la société humaine, au même titre que la nature, comme rythmée par une harmonie universelle, où chaque cycle, chaque révolution, serait une étape vers un monde plus juste.
La Commune s’inscrit dans cette vision artistique, tombée tragiquement à l’apogée du printemps 1871, mais ravivée aux battements de nos pas et de nos cœurs, à chacun de nos rendez-vous.

Au joli mois de mai, au temps des cerises, elle nous guide dans un Paris en fleurs, le plus souvent ensoleillé.
Marcher dans le Paris des faubourgs pour un idéal de République sociale, à visage découvert, chantant et hissant haut nos fanions, voilà un geste qui depuis 145 ans est immuable, même à l’ère du numérique.
Nul besoin de Google pour trouver le chemin du Père-Lachaise ni de Chat GPT pour nous apprendre que les peuples ont plus que jamais besoin de l’idéal communal.
Car si le monde s’est transformé, les injustices, elles, n’ont pas disparu.
La célèbre prédiction du film Le Guépard est toujours d’actualité : tout a changé, mais rien n’a changé.
Aujourd’hui, il existe des endroits où l’on exploite comme au XIXe siècle, travail forcé, travail des enfants, et d’autres où l’on exploite de façon plus insidieuse, plus moderne, en faisant croire à l’exploité qu’il est son propre patron. Un bon moyen de rendre impossible toute forme de solidarité.
Dans ce monde nouveau, les massacres aussi existent toujours : viols, démembrements, exécutions sommaires, mais on a inventé d’autres méthodes plus sophistiquées : une Intelligence Artificielle indique les cibles, là où ça fera le plus mal, et les drones se chargent de larguer les bombes. C’est le progrès !
Celles qui n’ont pas changé depuis le XIXe siècle, ce sont les victimes : massacrées, exploitées, colonisées, déplacées, ballottées par les guerres. Dans leur immense majorité, elles n’espéraient que vivre dignement et en paix.
Souvent les dirigeants se hâtent d’effacer les sales périodes de l’histoire, quand ils ne tentent pas carrément de les réécrire. Ils veulent passer à autre chose, laissant les victimes au seul refoulement de leur douleur.
L’association des Amies et Amis de la Commune perpétue la mémoire de la Commune pour l’offrir à tous ceux qui veulent s’en inspirer.
Nous ne sommes ni dans les batailles de mots, ni dans les batailles de chiffres. Nous racontons l’histoire des idées qui l’ont animée, mais surtout celle des gens.
Donner un nom, ne pas oublier, ne pas recouvrir.
La Commune a ses martyrs et ses héros, tombés sur les barricades, fusillés ou déportés, ses penseurs et ses architectes, élus à l’assemblée communale ou dans les arrondissements.
Mais nous n’oublions pas tous les autres, inconnus, qui ont porté l’espoir, chacun à sa tâche, au service de l’idéal communal.
À Paris comme dans les comités de province, nous nous attachons à les nommer, raconter des bribes de leur vie à partir des quelques informations, parfois une photo, puisées dans les archives.
Un nom, un métier, une origine, et l’imagination fait le reste. On ne les oubliera plus.
Vive la Commune !
PHILIPPE MANGION