En cette fraîche après-midi d’un printemps naissant, Yves Lenoir nous accueille dans le XXe arrondissement, à Belleville qui était avant même la Commune, un village frondeur et prolétaire. À proximité du Père-Lachaise où eurent lieu les derniers combats de la Semaine sanglante, nous allons à la rencontre de grandes figures de la Commune.
- Commémoration de la Commune - 18 mars 2012 dans le XXe
MAXIME LISBONNE.
Devant le 12 de la rue de Belleville, un texte d’Isabelle Kling évoque Maxime Lisbonne (1839-1905), le « d’Artagnan de la Commune », qui, en ce lieu, a ouvert un drôle de café, le 12 février 1886 ;
celui qui écrivait sur ses cartes de visite : « Maxime Lisbonne, exforçat de la Commune » est une personnalité originale et un républicain convaincu partisan, dès le début de la Commune, d’une marche immédiate sur Versailles. Marcel Cerf dit à son sujet :
« Si la Commune avait eu beaucoup de défenseurs comme Maxime Lisbonne, malgré les conditions d’infériorité de lutte, le résultat final n’eût peut-être pas été le même. »
LA BARRICADE DE LA RUE RAMPONEAU.
Passant devant le domicile de Jules Vallès en 1870, au 19 de la rue de Belleville, nous gagnons l’angle des rues de la Tourtille et Ramponeau où Aline Raimbault raconte les combats qui se sont livrés sur celle que Lissagaray estime être la « dernière » barricade. Dans le XXe arrondissement, 76 barricades ont été dressées ; pendant la Semaine sanglante, la dizaine de milliers de Fédérés résiste le plus possible aux 120 000 versaillais.
Rue Jouye Rouve, une délégation de la mairie de l’arrondissement nous attend pour déposer une gerbe devant la plaque apposée le 18 mars 2011, en hommage à la Commune pour son 140e anniversaire. Claudine Rey prend la parole pour rappeler les idéaux de la Commune, ses combats et demander la réhabilitation des communards.
LES RÉUNIONS RÉPUBLICAINES.
Place Fréhel, Marc Lagana nous parle des réunions « républicaines » publiques qui déterminent l’orientation révolutionnaire, la progression du mouvement, et la préparation de la Commune. Pendant le siège de Paris, ces réunions s’organisent et se structurent en devenant des clubs qui prennent le nom des salles où ils se sont établis ; ainsi en est-il de la salle de bal Favier au 13 rue de Belleville, devenue club Favier.
GUSTAVE FLOURENS.
Devant le 397 rue des Pyrénées, Jean-Louis Robert intervient à propos de Gustave Flourens (1838-1871), un savant athée et rationaliste qui s’est fait le chevalier rouge de la révolution. Internationaliste, franc-maçon, il va combattre en Crète avec les insurgés. Puis il devient un familier de Marx pendant son exil, en mars 1870. Elu de la Commune dans le XXe arrondissement, il commande la XXe légion. Il marche sur Versailles, mais il est arrêté, puis reconnu, il est assassiné d’un coup de sabre à la tête.
JEAN-BAPTISTE DUMAY.
Ensuite à l’angle de la rue Jean-Baptiste Dumay, Yves Lenoir nous présente ce communard, ouvrier mécanicien des usines Schneider du Creusot, à l’initiative, avec Adolphe Assi, des puissantes grèves des mineurs et ouvriers de cette ville en 1870, avec le soutien de l’Internationale. Le 26 mars 1871, les « Républicains » du Creusot, avec Jean-Baptiste Dumay, proclament la Commune. Mais l’armée intervient mettant rapidement un terme à cette jeune Commune. Dumay s’exile en Suisse.
L’ANCIENNE MAIRIE DE BELLEVILLE.
Georges Beisson intervient sur la mairie de Belleville en 1871. Elle était alors, en face du 135 rue de Belleville, au centre de la commune, mais en périphérie de l’arrondissement. Belleville est illustré par de nombreuses personnalités dont Gabriel Ranvier (1828-1879), berrichon d’origine, peintre-décorateur sur laque. Elu, le 26 mars, membre de la Commune pour le XXe, à la commission militaire, puis le 2 mai, élu au comité de Salut public, il est un ardent défenseur de Belleville les derniers jours de la Semaine sanglante. Condamné par contumace, en exil à Londres, d’abord proche de Marx, puis de Bakounine, il revient à Belleville pour y mourir.
JEAN ALLEMANE (1843-1935).
C’est au 25 rue Levert qu’il fut arrêté le 28 mai 1871. Michel Puzelat nous parle de cet ouvrier typographe qui habite le Ve arrondissement. Le 18 mars, il fait sonner le tocsin. Il n’est pas élu de la Commune, mais préside la légion du Ve ; il fait enlever la croix du dôme du Panthéon et lui substitue un immense drapeau rouge. Il prend part à la laïcisation des établissements scolaires et songe à l’organisation d’un enseignement professionnel. Mais quand le Ve est défait, il passe dans le XXe. Dénoncé, il est arrêté et condamné aux travaux forcés à perpétuité. Il passe sept ans au bagne, en Nouvelle-Calédonie. A partir de 1880, son histoire se confond avec celle du mouvement ouvrier et socialiste. Il participe à la création, en 1889, la « Société fraternelle des anciens combattants de la Commune ».
ZÉPHIRIN CAMÉLINAT (1840-1932).
Nous apercevons son ancien domicile au 135 rue de Belleville. Agriculteur, monteur en bronze, un des fondateurs de l’Internationale ; après s’être occupé avec Albert Theisz de la Poste, il devient directeur de la Monnaie sous la Commune. Il entretient des relations difficiles avec Charles Beslay, délégué à la Banque de France. Pour payer les dépenses de la Commune, il frappe des pièces. Il se bat sur la barricade du Château-d’Eau où il voit mourir Delescluze et Vermorel. Il est un des membres fondateurs de la Fraternelle.
D’autres événements et d’autres personnages auraient eu leur place dans ce parcours, mais le temps nous a manqué. Que de belles rencontres en ce 18 mars 2012 : de quoi nous donner l’exemple et l’envie de lutter ! Après que nos amis ont représenté un extrait de notre pièce Le Rendez-vous du 18 mars, accompagnés par les artistes Malène Lamarque et Fanchon Préaux, nous avons chanté la Commune.
MICHÈLE CAMUS