Apprenti ciseleur en bronze, Albert Theisz est initié très tôt aux problèmes sociaux. Dès 1859, au sein d’association de bronziers, il milite pour la création de chambres syndicales ouvrières, et en 1862, à l’Exposition universelle de Londres, il combat pour l’extension des compétences des sociétés de secours mutuel et le droit de grève. Les conflits entre ouvriers et patronat se succèdent, les bronziers et notamment Theisz, en tant que membre dirigeant de la Société des Bronziers, sont à la pointe du combat.

Albert Theisz (1839-1881)
Albert Theisz (1839-1881)

Ayant pris part à sa création en janvier 1865, Albert Theisz a adhéré parmi les premiers à l’Association internationale des travailleurs (AIT). Suite à la dissolution du bureau parisien par décision judiciaire, il va aider Eugène Varlin à la constitution d‘une section clandestine de l’AIT, pour finalement en prendre la tête lorsque Varlin est emprisonné. Theisz veut fédérer les sociétés ouvrières, dans l’idée que «  l’émancipation des travailleurs doit être l’oeuvre des travailleurs eux mêmes  » (extrait du règlement de l’AIT rédigé par Marx).

En 1868, Theisz est un des fondateurs de la Chambre fédérale des sociétés ouvrières de Paris. Celle-ci et l’AIT vont se prononcer contre le plébiscite du 8 mai 1870, entraînant le troisième procès de l’AIT et l’emprisonnement d’Albert Theisz. Il en sortira avec la chute de l’Empire, le 4 septembre 1870.

Lettre d’Albert Theisz concernant le citoyen Ferdinand Boulet, 28 avril 1871  (source : © Musée Carnavalet – Histoire de Paris)
Lettre d’Albert Theisz concernant le citoyen Ferdinand Boulet, 28 avril 1871 (source : © Musée Carnavalet – Histoire de Paris)

Theisz sera de toutes les organisations : membre du Comité central républicain des vingt arrondissements (rebaptisé ensuite Délégation des vingt arrondissements), enrôlé dans la Garde nationale, il participe également à la reconstitution d’une trentaine de sections de l’AIT et des sociétés ouvrières. Le 7 janvier 1871, Theisz figure parmi les 140 signataires de la deuxième «  affiche rouge », qui dénonce violemment le gouvernement et se termine par

Place au peuple, place à la Commune ! 

Le 18 mars 1871, le Comité central de la Garde nationale prend le pouvoir et proclame la Commune.

Le 25 mars, Theisz est nommé directeur des postes par le Comité central de la Garde. Il est élu dans le XIIe arrondissement, ainsi qu’à la Commission du travail, de l’industrie et de l’Échange.

Minoritaire, il s’oppose au secret des délibérations et vote pour l’incompatibilité du mandat d’élu de la Commune et de député à la Chambre.

Il soutient le versement d’une pension aux veuves orphelins et ascendants, principe adopté, ainsi que celui d’une pension accordée aux femmes des gardes nationaux, concubines comprises. Theisz participe à la commission chargée de préparer le décret sur les échéances et les loyers. Il participe également à la mise en place d’une aide aux ouvriers malades ou chômeurs.

Minoritaire à nouveau, Theisz se prononce contre le renversement de la colonne Vendôme, contre la modification de la loi électorale pour les élections complémentaires et contre la mise au secret des prisonniers. Il va s’opposer à l’institution d’un Comité de salut public.

Lorsque les troupes versaillaises entrent dans Paris, le 22 mai, Theisz va trouver refuge chez un ami ouvrier ciseleur, puis s’enfuit à Londres, chez Karl Marx, le 29 juillet.

Une fois à Londres, il reprend son métier de ciseleur puis devient blanchisseur, mais continue en parallèle à militer à l’AIT. Theisz participe activement à l’aide aux réfugiés, ainsi qu’à la création d’un cercle d’études sociales destiné à rédiger l’histoire de la Commune et à donner des conférences sur le sujet. Le 13 mars 1874, Theisz est condamné à mort par contumace, mais le 11 juillet 1880, la loi d’amnistie est promulguée. Theisz peut alors rentrer à Paris.

A Londres, Theisz a déjà publié des articles dans le journal Le Prolétaire et Le Réveil de Haute Garonne. Une fois à Paris, il se charge des questions sociales dans l’Intransigeant, et ce à partir du 2 août 1880. Sa pensée s’est affinée, il ne pense pas que « le mot République suffise pour arrêter la lutte des classes ! ». Pour lui « s’instruire et s’organiser, telle doit être la ligne de conduite du Parti ouvrier dans la période que nous traversons ». Il décrit les conditions des travailleurs et insiste sur le rôle que doit jouer l’Etat dans la lutte inégale des ouvriers contre les patrons.

Albert Theisz s’éteint le 10 janvier 1881. Ses obsèques seront suivies par plus de vingt mille personnes.

DANIEL SPASSKY

 

 

Bibliographie

Frischmann Georges, Albert Theisz, Édition de la Fédération des Postes et Télécommunications ; 

Dictionnaire biographique du Mouvement ouvrier français, Tome 9, 1864-1871. pp 189-191 ;

Noël Bernard, Dictionnaire de la Commune, Flammarion. 1978. ;

René Bidouze, La Commune de Paris telle qu’en elle-même. Éd. Temps des Cerises.

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