De 1871 à 1876, les tribunaux militaires avaient prononcé 13 450 condamnations à l'encontre des communards dont 7 900 peines de travaux forcés et de déportation. Durant cette période, seules quelques voix s'étaient élevées en faveur de l'amnistie, notamment celle de Victor Hugo.
En septembre 1873 et mai 1876, les propositions d'amnistie formulées respectivement par le radical Perrin et le républicain Alfred Naquet avaient été rejetées par l'Assemblée à majorité monarcho-bonapartiste élue en février 1871.
En 1876, les républicains deviennent majoritaires à la Chambre des députés. La question de l'amnistie est alors posée avec plus de force. Mais des républicains modérés, notamment Gambetta, s'y opposent car ils restent hostiles aux idéaux de progrès social et démocratique, d'émancipation des travailleurs hommes ou femmes, Français ou étrangers, qui étaient ceux de la Commune. Cette révolution fait encore peur aux possédants. La proposition de Raspail en faveur de l'amnistie est rejetée par la nouvelle majorité. Fin 1876, cependant 48 condamnés étaient graciés mais non amnistiés.
En mai 1877, Mac Mahon, président de la République dissout la Chambre des députés mais une nouvelle majorité républicaine sort encore des urnes. Le 14 juillet 1878, 435 grâces sont accordées.
Le 5 janvier 1879, lors du renouvellement du tiers du Sénat, les républicains sont majoritaires. Mac Mahon démissionne et est remplacé par Jules Grévy à la présidence de la République. 2 245 condamnés sont graciés le 30 janvier 1879.
Si ces grâces sont les bienvenues pour les déportés et prisonniers qui en bénéficient, elles n'effacent pas leur condamnation. En effet, les communards n'étaient pas considérés comme des prisonniers politiques mais comme des condamnés de droit commun accusés d'avoir participé ou d'être complices de
vols, détérioration ou incendie de monuments publics ou privés, exécutions sommaires.
1879 : amnistie partielle
La question de l'amnistie revient avec force. Une première brèche est ouverte par la loi du 3 mars 1879 qui accorde l'amnistie à tous les condamnés graciés ou libérés dans les trois mois suivant la promulgation de ce texte. 3 300 condamnés sont amnistiés. Les premiers graciés amnistiés sont accueillis en triomphe à Port-Vendres en septembre 1879.
Le mouvement en faveur de l'amnistie totale prend de l'ampleur. Le Conseil général de la Seine émet le voeu d'une amnistie totale. Blanqui, enfermé à Clairvaux est élu à Bordeaux le 6 avril. L'élection est annulée mais le vieux révolutionnaire est libéré le 11 juin. En octobre, l'ancien communard gracié Alphonse Humbert est élu conseiller municipal de Paris dans le 15e arrondissement. Le Congrès ouvrier réuni à Marseille du 23 au 30 octobre 1879 à l'initiative de Jules Guesdes exalte la Commune. Fin 1879, la Chambre repousse pourtant une nouvelle fois l'amnistie totale.
1880 : l'amnistie totale
En 1880, l'anniversaire du 18 mars est célébré à Paris et dans plusieurs villes de province. Le 23 mai, une foule de Parisiens déposent des couronnes de fleurs au mur des Fédérés. Le 20 juin, le communard amnistié Trinquet est élu dans le XXe arrondissement de Paris de même que Blanqui à Lyon. Les républicains modérés s'inquiètent. En juin, Gambetta propose l'amnistie générale qu'il avait rejetée six mois plus tôt.
Le 10 juillet 1880, l'Assemblée nationale vote la grâce de tous les condamnés de la Commune qui sont amnistiés le 14 juillet devenu Fête nationale. Les derniers déportés libérés et les communards exilés rentrent en France.
Yves Lenoir